Dualisme (religion)

Le dualisme religieux est une doctrine qui postule la coexistence de deux principes éternels et inengendrés à l'origine de la création du bien (l'âme, le monde spirituel) et du mal (le corps, le monde matériel). Un Être mauvais est co-éternel au Dieu primordial. « Cela implique un jugement de valeur (bon, mauvais) et une polarisation hiérarchique de la réalité à tous les niveaux : cosmologique, anthropologique, éthique, etc. » (Ioan P. Couliano[réf. nécessaire]). « Secondairement, le terme « dualisme » a également servi à définir le gnosticisme, au sens où celui-ci met l'accent sur la distance infinie qui sépare Dieu du monde, et considère que le Dieu de l'ancienne Loi, qui agit directement sur le monde, n'est pas le vrai Dieu »[1].

Le mot « dualisme » apparaît avec Thomas Hyde (Historia religionis veterum Persarum, Histoire de la religion des anciens Perses, p. 164), en 1700. Pierre Bayle utilise le mot dans son Dictionnaire[2]. Dès lors est dualiste toute religion dans laquelle un principe du mal, distinct et autonome, existe depuis toujours et conjointement avec Dieu. Le principe s'oppose au monothéisme et au polythéisme. Le philosophe Christian Wolff a transposé le mot à la relation entre corps et âme, ce qui met alors « dualisme » en opposition avec « monisme »[3].

La formulation la plus connue revient à Zoroastre : « De ces deux principes fondamentaux qui ont été conçus comme jumeaux et qui naissent dans la pensée, l'un représente le bien et l'autre le mal. Entre ces deux, le sage choisit le bien et l'ignorant le mal. Et lorsque, dès l'origine, ces deux principes fondamentaux se sont rencontrés, ils ont créé la vie et la non-vie. Ainsi les disciples de la justesse atteindront la meilleure existence et les disciples du mensonge ne la connaîtront pas. De ces deux principes opposés, le disciple du mensonge choisira les pires actions, alors que celui qui va vers les meilleures pensées satisfait Ahura Mazda en choisissant la justesse et en persévérant pour l'atteindre »[4]. Mais les interprétations divergent, puisque la mention du dieu Ahura Mazda semble indiquer un monothéisme, et celle des jumeaux (Esprit du bien « Spenta Mainyu », Esprit du mal « Angra Mainyu ») un dualisme. Selon Martin Haug, Zoroastre a une théologie monothéiste (Ahura Mazda) et une philosophie dualiste (le bien et le mal, inhérents à Dieu comme à l'homme)[5],[6]. Pour James Darmesteter, il y a dualisme, opposition entre Ahura Mazda et Angra Mainyu, fondamentalement et dès l'origine[7]. Selon Walter Henning, la religion antérieure était monothéiste, Zoroastre innove en posant le problème du mal et la solution du dualisme (deux Esprits primordiaux, Spenta Mainyu et Angra Mainyu, jumeaux)[8]. En revanche, selon Gherardo Gnoli, face au polythéisme, Zoroastre innove en posant le monothéisme[9].

  1. Le grand Atlas des religions, Encyclopaedia Universalis, 1988, p. 399.
  2. Pierre Bayle, Dictionnaire, 1720, « Zoroastre ».
  3. Christian Wolff, Psychologia rationalis, 1734.
  4. Avesta, I : Yasna, gâtha 30, trad. Khosro Khazai Pardis, Les Gathas. Le livre sublime de Zarathoustra, 2011, p. 128
  5. (en) Martin Haug, Essays on the Sacred Language, 1862.
  6. Jean Kellens, « L'Iran mazdéen : Le temps créé et mesuré », dans Vinciane Pirenne-Delforge et Öhnan Tunca, Représentations du temps dans les religions : actes du colloque organisé par le Centre d'histoire des religions de l'Université de Liège, Librairie Droz, , 286 p. (lire en ligne), p. 240.
  7. James Darmesteter, Ormazd et Ahriman, 1877.
  8. (en) Walter Henning, Zoroaster, 1951.
  9. (en) Gherardo Gnoli, Zoroaster in History, 2000.

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