La monnaie de pierre, en yap rai, est une monnaie propre aux îles Yap dans les États fédérés de Micronésie prenant la forme d'une pierre ronde et plate, taillée dans de la calcite, de 4 à 350 cm de diamètre, avec généralement un trou en son centre. Extraite dans des carrières aux Palaos, car le matériau n'est pas disponible sur les îles Yap, elle est transportée en bateau ou sur radeau sur plusieurs centaines de kilomètres. Anagumang, personnage légendaire, est, dans les récits yapais, à l'origine de la monnaie de pierre et de sa forme rappelant la pleine lune.
La date d'apparition du rai est inconnue. Elle remonte au début du XVIIIe siècle au moins d'après des témoignages de voyageurs occidentaux. Un récit daté de 1843 rapporte que les monnaies de pierre sont prisées en raison de leur rareté. Dans le dernier tiers du XIXe siècle, la production augmente considérablement grâce à la présence du commerçant américain David O'Keefe qui, moyennant la fourniture d'outils en fer et le transport des pierres sur son bateau, reçoit à bon prix coprah et holoturies. La Première Guerre mondiale met fin à l'extraction à grande échelle. La taille de monnaie de pierre serait encore pratiquée épisodiquement au début du XXIe pour entretenir les savoir-faire.
Le rai est le principal moyen d'échange traditionnel et n'est utilisable que dans le cadre de transactions traditionnelles. Sa valeur résulte de son histoire depuis la carrière jusqu'au dernier échange effectué. Aux considérations esthétiques ou de dimensions s'ajoutent surtout un capital symbolique et culturel associé aux valeurs de souffrance et de difficulté — celles de l'extraction et du transport qui peuvent occasionner blessures et décès —, à celui des noms — le nom de chaque pierre, le nom de ceux qui les ont possédées, le nom des terres dont les chefs qui régissent les échanges de monnaies tirent leur légitimité — et enfin aux échanges.
Nombre de monnaies de pierre sont établies en bordure de terrains appelés malal, centres de pouvoirs destinés à la pratique de la danse, aux échanges de cadeaux entre les villages et aux réunions de chefs de village.
La monnaie de pierre et les témoignages ethnographiques la concernant ont été largement utilisés par les économistes pour l'identifier comme un exemple de monnaie fiduciaire sans actif (fiat money) et la considérer comme un analogue de l'étalon-or. Ce n'est qu'en 2005 que Dror Goldberg dénie l'existence de monnaies fiduciaires sans actif et rappelle que les monnaies de pierre ont une valeur pour elles-mêmes. Le système monétaire de la monnaie de pierre a également servi de fondement pour remettre en cause des certitudes établies sur le sujet de la monnaie. Récemment, la monnaie de pierre a été proposée comme un antécédent du Bitcoin.