Pharaon | ||
| ||
Pr-ˁȝ |
Le pharaon (de l'égyptien ancien : per-aâ « grande maison ») est le roi ou la reine de l'Égypte antique. Les noms de 345 pharaons nous sont parvenus grâce à de multiples attestations, dont des listes royales compilées par les scribes égyptiens. Ces souverains se sont succédé sur une période de plus de trois millénaires, entre 3150 et 30 avant notre ère. Selon les Ægyptiaca de Manéthon, historien et grand-prêtre d'Héliopolis au IIIe siècle avant notre ère, cette longue période est divisée en trente dynasties. Elle commence avec l'unification du royaume par le mythique Narmer-Ménès et s'arrête à la disparition de Nectanébo II, en 343 avant notre ère, le dernier pharaon d'une Égypte indépendante. Après lui se succèdent deux dynasties étrangères, la XXXIe dynastie des empereurs perses achéménides et la dynastie lagide d'origine macédonienne. L'archéologie a aussi permis de distinguer une dynastie archaïque, antérieure à la première, la dynastie égyptienne zéro.
Depuis le XIXe siècle, les égyptologues regroupent ces dynasties en des séquences plus longues. Les trois plus importantes sont les « Empires ». Chacun d'eux se termine par une période de désorganisation monarchique appelée « période intermédiaire ». À l'Ancien Empire, période de constructions des grandes pyramides de Gizeh, sont attachés les noms célèbres de Khéops, Khéphren et Mykérinos (IVe dynastie). À partir d'Ounas (fin de la Ve dynastie) puis sous ses successeurs de la VIe dynastie, les chambres funéraires s'ornent des Textes des pyramides, les plus anciens écrits religieux de l'Humanité. Au Moyen Empire se rattachent les différents Amenemhat et Sésostris (XIIe dynastie). Cette période se caractérise par son foisonnement littéraire et notamment par ses Sagesses qui encouragent les élites au loyalisme, à l'honnêteté et à la piété. Le Nouvel Empire marque l'apogée de la puissance militaire égyptienne avec la constitution d'une vaste aire d'influence depuis la Nubie au sud et jusqu'en Syrie-Palestine au nord. Cette période est celle des pharaons guerriers Thoutmôsis Ier, Thoutmôsis III, Séthi Ier, Ramsès II et Ramsès III, membres illustres des XVIIIe, XIXe et XXe dynasties. L'ultime représentant de l'institution pharaonique proprement dite est le dernier Lagide, Ptolémée XV (dit Césarion), fils de Jules César et de Cléopâtre. Quelques empereurs romains, tels Trajan à Philæ, ont toutefois accaparé le discours et l'imagerie pharaonique dans le but de s'inscrire dans cette longue tradition monarchique.
La monarchie pharaonique a développé dès ses origines un discours idéologique fondé sur l'union des Deux Terres (Haute et Basse-Égypte). Chaque pharaon est ainsi le garant d'une unité égyptienne voulue et instituée par les dieux. Lors de son couronnement, la puissance royale se matérialise par l'obtention d'emblèmes magiques (couronnes, coiffes, sceptres) et l'élaboration d'une titulature sacrée. Le pouvoir divin de Pharaon est par la suite régulièrement confirmé ; chaque année à l'occasion du nouvel an, et plus fastueusement lors de la fête jubilaire des trente ans de règne.
La personnalité de Pharaon est complexe. À la fois humain et dieu, il est le descendant de l'Ennéade d'Héliopolis, la dynastie des dieux-rois. Selon la mythologie monarchique, le trône d'Égypte a été institué par le démiurge. Il l'a ensuite transmis aux dieux ses successeurs, puis à des êtres semi-divins, les Suivants d'Horus qui précèdent immédiatement les rois historiques dans les listes royales. Dans les textes initiaux, Pharaon est le faucon Horus sur le trône des vivants, dieu puissant et jeune. Mort, il est Osiris, le dieu régénéré par la momification et le souverain éternel de l'Au-delà. Pharaon est aussi le fils de Rê selon la théologie solaire héliopolitaine et le fils d'Amon selon le mythe thébain de la théogamie.
Comme chef religieux, Pharaon a pour première mission de mettre en œuvre la Maât sur terre, c'est-à-dire l'harmonie entre les hommes et les dieux, d'affermir la moralité du peuple et d'assurer la prospérité des familles. Maintenir l'ordre du monde (Maât) et combattre le mal (isfet), c'est satisfaire les divinités qui « vivent de Maât ». Aussi Pharaon se doit-il de bâtir, de restaurer et d'agrandir les temples, d’assurer le bien-être matériel des prêtres et de veiller à l’accomplissement correct des rites. Dans la pratique, il délègue l'exercice du culte à un clergé qu'il supervise. Ignorant la séparation des pouvoirs, Pharaon est à la fois le prêtre suprême, l'administrateur principal, le chef des armées et le premier magistrat de l'Égypte antique. À lui seul revient de choisir la politique à mener. Comme pour le culte, il délègue l'exécution de ses décisions gouvernementales à une cohorte de courtisans, de fonctionnaires et de conseillers, le premier d'entre eux étant le vizir.
Dans l'entourage royal, les femmes occupent une grande place en tant que mères, épouses ou filles. Quelques-unes, dont Hatchepsout, ont même accédé à la charge pharaonique. Grand polygame, Pharaon possède de nombreuses concubines, pratique des unions rituelles incestueuses ainsi que des mariages diplomatiques. Ces multiples épouses sont regroupées au sein du harem sous les ordres de la Grande épouse royale. Ce lieu de vie est régulièrement agité par des conspirations dues à des rivalités entre co-épouses. Dans les cas les plus graves, la vie de Pharaon s'en trouve menacée, à l'image des fins tragiques de Téti, Amenemhat Ier et Ramsès III. Mort de vieillesse ou assassiné, Pharaon repose momifié dans une somptueuse tombe ; dans un caveau funéraire aménagé dans une pyramide aux Ancien et Moyen Empires, dans un hypogée de la vallée des Rois au Nouvel Empire ou dans une nécropole aménagée dans l'enceinte d'un temple à la Troisième Période intermédiaire et à la Basse époque. À ce jour, la plus célèbre découverte est celle du tombeau de Toutânkhamon, réalisée en 1922 par le britannique Howard Carter.
Les grands pharaons sont passés à la postérité grâce aux écrits égyptiens de l'Antiquité, aux témoignages des historiens et géographes grecs (Hérodote, Diodore, Strabon) et aux chroniques bibliques. L'un des plus célèbres est le pharaon de l'Exode, figure archétypale du souverain despotique opposé aux desseins du Dieu de Moïse. Sans preuve tangible, ce pharaon est fréquemment identifié au glorieux Ramsès II, en particulier dans les films hollywoodiens narrant la sortie des Hébreux hors d'Égypte.