Porajmos

Porajmos
Image illustrative de l’article Porajmos
Un groupe de Roms à Asperg, en Allemagne, rassemblés par les autorités du Reich pour être déportés, le .

Date 1935-1945
Lieu Allemagne nazie et Europe sous domination nazie
Victimes Tziganes
Morts estimation : 200 000 à 500 000
Auteurs Drapeau de l'Allemagne nazie Troisième Reich et régimes satellites ou collaborationnistes
Motif Antitziganisme
Racisme
Guerre Seconde Guerre mondiale

Le Porajmos, Porrajmos (littéralement « dévorer » en romani), Samudaripen ou génocide tsigane est l'entreprise de persécutions et d'extermination des ethnies roms[1] (ou sinté, manouches, gitans, yéniches, kalderash, etc.) appelés « Tsiganes » (Zigeuner en allemand), nomades, sédentaires ou semi-sédentaires[2] pendant la Seconde Guerre mondiale, en Allemagne nazie, dans les territoires qu'elle occupe et chez ses alliés[3].

Les estimations de plusieurs historiens varient entre 200 000 et 500 000 victimes.

Les Roms sont démographiquement la deuxième population européenne victime d'une extermination familiale et raciale, après les Juifs d'Europe[4].

En Europe, la reconnaissance de ce génocide est tardive[5]. C'est en 1982 qu'il est reconnu en Allemagne, où son déni relève d'une infraction pénale[2].

Outre l'antitsiganisme persistant[6], de multiples raisons ont pu contribuer à ce retard[7],[8],[9],[10]. Comme les traumastismes générés pour les survivants, associés aux coutûmes de transmissions orales. Une tradition des tabous, de la discrétion[11], l'usage de noms d'emprunt, ainsi que le partage interne à la communauté due à une méfiance accrue en raison des persécutions[12],[13]. Faute d'une organisation puissante pour représenter ces peuples sans frontière et politiquement sous-représentés[14],[15], les autorités ont pu occulter ce génocide durant plusieurs décennies.

En raison du nomadisme qui concerne une partie d'entre eux, le recensement par les administrations officielles est délicat[16],[17],[18]. Contrairement à une idée répandue, la grande majorité de ces populations, qui sont présentes en Europe depuis le VIIIe siècle, étaient des familles sédentaires, stables et faisant partie intégrante des sociétés[19] Les Roms, sédentaires ou non, sont surveillés et fichés dès que possible par la majeure partie des États européens, ce dès la fin du XIXe siècle, ce qui facilite les actions violentes menées contre eux[20],[21].

Les victimes du Porajmos ont été longtemps oubliées[22], parfois confondues avec des personnes juives[23]. Pour marquer les détenus tsiganes des camps, les nazis leurs ont attribué le triangle marron. Certains ont été catégorisés avec les asociaux[24], en raison d'une méconnaissance de leur mode de vie jugé « précaire ». Cette dernière catégorie arbitraire[25] regroupait également des personnes en situation de handicap et les autres minorités ciblées par les nazis[26],[27].

Identifiés par les partisans du Troisième Reich tantôt Tsiganes, Tsiganes métissés, nomades, asociaux, politiques[28], ou identité usurpée/dissimulée, le nombre réel de victimes reste indéterminé.

  1. (en) « Conseil de l'Europe Roma Genocide Germany », sur www.coe.int (consulté le )
  2. a et b (en-GB) « Factsheet on the Roma Genocide in Germany - Roma Genocide - www.coe.int », sur Roma Genocide (consulté le )
  3. Catherine Coquio et Aurélia Kalisky, L'enfant et le génocide: témoignages sur l'enfance pendant la Shoah, R. Laffont, coll. « Bouquins », (ISBN 978-2-221-09989-6), p. 1206.
  4. Georges Bensoussan (dir.), Jean-Marc Dreyfus (dir.), Édouard Husson (dir.) et al., Dictionnaire de la Shoah, Paris, Larousse, coll. « À présent », , 638 p. (ISBN 978-2-03-583781-3), p. 557.
  5. Mémoires tsiganes, l'autre génocide, Idit Bloch, Juliette Jourdan, Henriette Asséo (), consulté le .
  6. « Commémoration de l'Holocauste des Roms : un expert de l'ONU exhorte les gouvernements à réprimer les discours et les crimes haineux », sur ONU Info, (consulté le ).
  7. Michael Stewart, « Une catastrophe invisible », Terrain. Anthropologie & sciences humaines, no 54,‎ , p. 100–121 (ISSN 0760-5668, DOI 10.4000/terrain.13989, lire en ligne, consulté le ).
  8. « L’histoire des Roms en Europe : guérissons l’amnésie ! - Commissaire aux droits de l'homme », sur Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe (consulté le ).
  9. (en) « OSCE/ODIHR calls for remembrance of and education about Roma genocide as key to avoiding recurrence of past atrocities », sur OSCE (consulté le ).
  10. C. R. Sridhar, « Historical Amnesia: The Romani Holocaust », Economic and Political Weekly, vol. 41, no 33,‎ , p. 3569–3571 (ISSN 0012-9976, lire en ligne, consulté le ).
  11. Claire Cossée, « Familles tsiganes et protection de l'intimité », Ethnologie française, vol. 32, no 1,‎ , p. 49–59 (ISSN 0046-2616, DOI 10.3917/ethn.021.0049, lire en ligne, consulté le ).
  12. Lise Foisneau, « La crainte des Roms. Pratiques romanès de la défiance », Tracés. Revue de Sciences humaines, no 31,‎ , p. 87–108 (ISSN 1763-0061, DOI 10.4000/traces.6714, lire en ligne, consulté le ).
  13. Claire Cossée, « Familles tsiganes et protection de l'intimité », Ethnologie française, vol. 32, no 1,‎ , p. 49–59 (ISSN 0046-2616, DOI 10.3917/ethn.021.0049, lire en ligne, consulté le ).
  14. (en) Iulius Rostas et Dan Pavel Doghi, « Roma and Sinti Political Participation », dans Effective Participation of National Minorities and Conflict Prevention, Brill Nijhoff, , 176–196 p. (ISBN 978-90-04-39033-1, DOI 10.1163/9789004390331_010, lire en ligne).
  15. (en) « Enabling full political participation is vital to improve the situation of Roma and Sinti, says head of international human rights office ODIHR », sur www.osce.org (consulté le ).
  16. Emmanuel Filhol, « Le traitement administratif des Tsiganes dans les Landes (1895-1946) », Annales du Midi, vol. 122, no 271,‎ , p. 407–429 (DOI 10.3406/anami.2010.7332, lire en ligne, consulté le ).
  17. « L’internement des Nomades, une histoire française (1940-1946) », sur Mémorial de la Shoah (consulté le ).
  18. (en) Leo Lucassen, « « Harmful tramps » Police professionalization and gypsies in Germany, 1700-1945 », Crime, Histoire & Sociétés / Crime, History & Societies, vol. 1, no 1,‎ , p. 29–50 (ISSN 1422-0857, DOI 10.4000/chs.1029, lire en ligne, consulté le ).
  19. Henriette Asséo, « Non, les Tsiganes ne sont pas des nomades », sur Le Monde diplomatique, (consulté le ).
  20. Emmanuel Filhol, « La loi de 1912 sur la circulation des « nomades » (Tsiganes) en France », Revue européenne des migrations internationales, vol. 23, no 2,‎ , p. 135–158 (ISSN 0765-0752, DOI 10.4000/remi.4179, lire en ligne, consulté le ).
  21. « Des Tsiganes sous surveillance : du carnet anthropométrique au carnet de circulation : épisode • 2/3 du podcast Une histoire de la Bohême et des bohémiens », sur France Culture (consulté le ).
  22. (en-GB) Mathiess & Schnegg, « "Racial Diagnosis : Gypsy" The nazi genocide of the Sinti and Roma and thelong struggle for recognition », sur www.sintiundroma.org (consulté le ).
  23. (en) Suzanna King, The gypsy holocaust : Forgotten Victims, (lire en ligne Accès libre [PDF]), P.15.
  24. Henriette Asséo, « Le sort des Tsiganes en Europe sous le régime nazi », Revue d’Histoire de la Shoah, vol. 167, no 3,‎ , p. 8–19 (ISSN 1281-1505, DOI 10.3917/rhsho1.167.0009, lire en ligne, consulté le ).
  25. Henriette Asséo, « L'avènement politique des Roms (Tsiganes) et le génocide. La construction mémorielle en Allemagne et en France », Le Temps des médias, vol. 5, no 2,‎ , p. 78–91 (ISSN 1764-2507, DOI 10.3917/tdm.005.0078, lire en ligne, consulté le ).
  26. « Les différents catégories de détenus dans les camps de concentration nazis », sur Encyclopédie multimédia de la Shoah (consulté le ).
  27. « Asocial Prisoners · The Era of the Holocaust · », sur libapp.shadygrove.umd.edu (consulté le ).
  28. « Le Camp de la Forge de Moisdon - Témoignages - Trois ans de camp pour Eugène, le petit nomade », sur www.radio-aspic.net (consulté le )

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