La prolepse, du grec (ἡ) πρόληψις (ê) prolêpsis (pour les philosophes : action de prendre d'avance, notion acquise par les sens ; chez les Épicuriens : notion antérieure à toute perception par les sens ou à toute éducation de l'esprit, idée innée), est un procédé littéraire possédant quatre acceptions :
- en syntaxe, il s'agit d'une expression anticipée, dans le COD de la principale, du sujet de la subordonnée comme dans « Regarde cette auto, comme elle est belle ».
- en rhétorique, la prolepse est une figure par laquelle on prévient une objection, en la refusant d'avance comme dans « Cela serait trop long à expliquer ».
- en stylistique, c'est une attribution anticipée, au sujet ou à l'objet d'un verbe, d'une propriété qu'ils n'acquerront qu'une fois accomplie l'action exprimée par le verbe : « Résolu d'accomplir ce cruel sacrifice, / J'y voulus préparer la triste Bérénice » (Racine, Bérénice)
- en narratologie, la prolepse — ou anticipation — est une figure de style par laquelle sont mentionnés des faits qui se produiront bien plus tard dans l'intrigue : « Cet hiver 1657 était notre première “mauvaise saison” et il ne fut pas des plus cléments. [...] Début avril, les jours commencèrent à rallonger sensiblement. » (M. Piquemal, Le Pionnier du Nouveau Monde) ; la célèbre première phrase de Cent ans de solitude, de Gabriel García Márquez, est à cet égard très éclairante : « Bien des années plus tard, face au peloton d’exécution, le colonel Aureliano Buendia devait se rappeler ce lointain après-midi au cours duquel son père l’emmena faire connaissance avec la glace. »
Pour Patrick Bacry « l'anacoluthe est si proche de la prolepse que la différence entre les deux figures est « fort
ténue »[1].
- ↑ Patrick Bacry. Les figures de style, Paris, Éditions Belin, 1992 in Ni-Lu-Hoa Nguyen. Narration graphique: l'ellipse comme figure et signe peircéen dans la Bande Dessinée. Thèse Université de Montréal. 2009 Lire en ligne