Serbo-croate

Serbo-croate
Bosniaque-croate-monténégrin-serbe
Srpskohrvatski jezik
Српскохрватски језик
Pays Serbie 8 millions de locuteurs, Bosnie-Herzégovine 4,6 millions de locuteurs, Croatie 4,5 millions de locuteurs, Monténégro 0,6 million de locuteurs.
Nombre de locuteurs 21 000 000
Typologie SVO + ordre libre, flexionnelle, accusative, accentuelle, à accent de hauteur
Classification par famille
Codes de langue
IETF sh
ISO 639-1 sh (déprécié sauf encore pour l’usage bibliographique ; préférer bs, hr ou sr pour l’usage terminologique)
ISO 639-3 hbs
Étendue macro-langue
Type langue vivante
Linguasphere 53-AAA-g
Glottolog sout1528
Carte
Image illustrative de l’article Serbo-croate
Territoire où les variétés linguistiques de la langue serbo-croate sont parlées (en bleu)
Zones où les dénominations politiques de la langue serbo-croate ou BCMS sont utilisées par la majorité absolue ou relative de la population (données de 2006)

Le serbo-croate (également appelé bosniaque, croate, monténégrin, serbe ou BCMS[1]) est une langue slave du groupe des langues slaves méridionales parlée dans l’ancienne Yougoslavie à la fois par les Serbes, les Croates, les Bosniaques et les Monténégrins. « Serbo-croate » était sa dénomination officielle dans l'ancienne Yougoslavie. D’autres dénominations officiellement acceptées pour cette langue étaient « croato-serbe », « serbe et croate », « croate et serbe », « serbe ou croate » et « croate ou serbe »[2].

Du point de vue de la linguistique comparée, le serbo-croate est une seule et même langue, c’est-à-dire dont les variétés présentent suffisamment de traits structurels communs, établis objectivement, pour constituer une langue unitaire et qui ne puisse pas être considérée comme le dialecte d’une autre langue[3],[4]. En sociolinguistique, Heinz Kloss a appelé une telle langue (de) Abstandsprache « langue par distance »[5].

Déjà à l’époque de la Yougoslavie communiste, on parlait de « variantes occidentale et orientale », et même déjà de « pratiques linguistiques standard bosno-herzégovinienne et monténégrine »[6]. Les locuteurs de cette langue ne l’appelaient pas couramment « serbo-croate », terme livresque et scientifique, mais, selon leur appartenance nationale, « serbe », respectivement « croate »[7]. Kloss et McConnell, en 1984, considéraient que le serbo-croate était une langue indépendante avec un statut de langue ausbau (terme introduit par Kloss en même temps avec abstand[5]), c’est-à-dire élaborée, pour chacune de ses deux variantes : serbe et croate[8]. Le processus ausbau s’est accéléré après le démembrement de la Yougoslavie quand, dans chacun des quatre États devenus indépendants, la volonté politique s’est affirmée de créer des langues nationales et officielles à part. Certains linguistes ont appliqué à leur tour le qualificatif ausbau aux nouvelles variétés standard aussi[9]. Ainsi, la dénomination « serbo-croate » a été abandonnée dans l’usage officiel, et remplacée d’abord par « bosnien », « croate » et « serbe »[2], puis « monténégrin » aussi, appelés officiellement des « langues ». Certains linguistes y voient une manifestation du nationalisme[10].

La conscience du fait que c’est une seule et même langue reste présente chez les linguistes. Ils[11] la considèrent comme une langue pluricentrique standard, qualification déjà appliquée au serbo-croate par Kloss[12], au même titre que l’anglais, l’allemand, l’espagnol etc., ayant à son tour quatre variétés standard. Certains linguistes continuent de l’appeler « serbo-croate »[13]. La linguiste Snježana Kordić affirme que, « en dépit de leur qualité de langue-Ausbau [elles] représentent bien une seule et même langue. C’est pourquoi utiliser les appellations langue croate, langue serbe, langue bosniaque, etc. pose problème » et, selon elle, l’appellation scientifique correcte de la langue commune reste « serbo-croate »[14].

D’autres linguistes appellent cette langue par un terme qu’ils considèrent comme neutre, par exemple diasystème slave du centre-sud[15], langue chtokavienne (štokavski jezik) (les quatre variétés ayant pour base le dialecte chtokavien de ce diasystème)[16] ou standardni novoštokavski « néochtokavien standard »[17]. D’autres linguistes encore ont adopté l’appellation BCS avant qu’un standard monténégrin n'apparaisse également, puis BCMS (pour bosnien-croate-monténégrin-serbe)[18].

Non seulement des linguistes, mais aussi des locuteurs ordinaires ont la conscience d’une langue commune, comme les participants à un projet appelé Jezici i nacionalizmi « Langues et nationalismes » et les signataires d’une « Déclaration sur la langue commune » lancée par ce projet[19],[20]. Dans la parole des locuteurs qui ont la conscience de leur langue commune on peut entendre l’appellation naš jezik « notre langue »[2].

  1. « BCMS », sur cnrs.fr (consulté le ).
  2. a b et c Hawkesworth 2009, p. 937.
  3. Kordić 2009a.
  4. Bailyn 2010, p. 7.
  5. a et b Kloss 1967, p. 29.
  6. Thomas 2018.
  7. Kordić 2004, p. 35.
  8. Kloss et McConnell 1984, p. 24.
  9. Par exemple Fasold 2005 (p. 698), Madsen 2017, (p. 86) ou Trousdale 2010, (p. 7)
  10. Par exemple Kordić 2010b.
  11. Par exemple Kordić 2004 (p. 36), Mørk 2008 (p. 295), Bunčić 2008 (p. 89), Zanelli 2018 (p. 20-21).
  12. Kloss 1967, p. 31.
  13. Par exemple Kordić 2009b (p. 97).
  14. Kordić 2004, p. 36.
  15. Terme proposé par Brozović 1998.
  16. Voir le site Štokavski jezik
  17. Appellation mentionnée par Kordić 2009b pour la rejeter (p. 98).
  18. Par exemple Thomas 2018.
  19. Site du projet Jezici i nacionalizmi (consulté le 6 novembre 2019).
  20. Liste des signataires de la « Déclaration sur la langue commune » (consulté le 6 novembre 2019).

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