Socialisme scientifique

L'expression « socialisme scientifique » est utilisée, à partir du milieu XIXe siècle, pour désigner une forme de pensée socialiste fondée sur une analyse à visée scientifique des réalités sociales, historiques et économiques. Elle s'inscrit dans le renouveau de la philosophie matérialiste induite par les nouvelles découvertes scientifiques et techniques. Son objectif final est d'apporter une réponse à la question sociale agitant le XIXe siècle européen. Par la force des choses, cette expression est devenue par son usage par les divers cercles socialistes puis communistes un synonyme du terme marxisme. Celui-ci est souvent divisé entre plusieurs concepts forts : le matérialisme historique, la lutte des classes ou théorie de la plus-value, etc.

Néanmoins, l'expression s'inscrit dans son siècle. La science moderne est alors inventée et devient à certains égards « la nouvelle religion de l'âge industriel »[1]. La science participe de la culture commune des savants du moment, tout comme elle se retrouve dans les discours philosophiques et politiques. Le socialisme n'y échappe pas. Il peut ainsi être défini comme une pensée sociologique, un savoir sur le social que ses adhérents diffusent dans la société afin de la transformer.

Le socialisme scientifique est alors tout autant le socialisme théorisé par Marx et Engels ainsi que par ceux se réclamant de leur filiation, que le socialisme qui mobilise les savoirs de son temps et propose une explication « scientifique » du monde social.

Mais comme toute pensée, il est difficile de rendre compte de sa diversité, tout autant qu'il est complexe de témoigner de sa diffusion. L'histoire des idées politiques reste bien souvent tributaire de ses sources, et bien plus de l'empreinte mémorielle de certains "grands penseurs". Si « les ouvriers peuvent penser »[2], voire pour certains, être des « ouvriers philosophes »[3], il n'en reste pas moins qu'ils ont laissé bien moins de traces que les journalistes, les intellectuels et autres penseurs professionnels socialistes. De plus, de par leur quotidien et leur éducation, ils ne disposent pas d'un égal rapport aux sciences et aux théories philosophique, politique et épistémologique. Enfin, les théories se diffusent au sein de divers réseaux locaux, nationaux, internationaux[4].

  1. Guillaume Carnino, L'invention de la science : la nouvelle religion de l'âge industriel, Paris, Le Seuil,
  2. Samuel Hayat, Les ouvriers peuvent-ils penser ? Pour une histoire sociale des idées ouvrières au XIXe siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes
  3. Jacques Rancières, La nuit des prolétaires, Paris, Fayard,
  4. Robert Stuart, Marxism at work : ideology, class and French socialism during the Third Republic, Cambridge, Cambridge University Press,

Developed by StudentB