Taupe d'Europe

Talpa europaea · Taupe

La Taupe d'Europe (Talpa europaea) est une espèce de petits mammifères fouisseurs de la famille des Talpidés. Cet animal vit sous terre, s'y nourrissant de vers de terre en creusant des tunnels et terriers dans les sols meubles. Sa présence peut être signalée par des taupinières. La Taupe d'Europe est l'espèce type du genre Talpa qui regroupe les taupes d'Eurasie et dont elle est le plus important représentant. Elle est génétiquement très proche de la Taupe d'Aquitaine (T. aquitania), de la Taupe ibérique (T. occidentalis) et de la Taupe aveugle (T. caeca), et s'en distingue essentiellement par l'absence de pli cutané recouvrant les yeux. Le genre Talpa est originaire d'Asie à la fin du Miocène et s'est répandu en Europe au Pliocène. Traditionnellement classée dans l'ancien ordre des Insectivores, sa famille est rangée depuis les années dans l'ordre des Eulipotyphles aux côtés des hérissons et des musaraignes. L'adulte mesure, sans la queue, de onze à seize cm et pèse de 70 à 130 g, la femelle étant un peu plus petite et légère que le mâle. Il s'agit d'un animal au corps cylindrique s'achevant par une queue courte, au cou peu marqué, aux « mains » caractéristiques, développées en forme de pelle et armées de griffes. Le museau allongé est surmonté d'yeux minuscules et peu fonctionnels. Les oreilles sont dépourvues de pavillons. La femelle présente quatre paires de mamelles. Sa fourrure, dense et brillante, de couleur gris foncé à noir sur le dessus du corps, plus claire en dessous, est constituée de poils implantés perpendiculairement à la peau.

Strictement carnivore, la taupe a des besoins alimentaires élevés et consomme plus de la moitié de son poids en nourriture par jour, dont 90 % est constitué de vers de terre. Son ouïe fine, son sens tactile prononcé et son odorat très développé pallient une vue déficiente et facilitent la détection de ses proies à travers les couches de terre. D'une nature solitaire et très peu sociable, voire agressive, elle ne rencontre ses congénères que lors de la reproduction, période durant laquelle la femelle hermaphrodite prend des attributs maternels plus marqués. Elle élève au printemps, durant six semaines, trois à cinq petits qui seront sexuellement matures l'année suivante. Les jeunes à la recherche de nouveaux territoires sont les plus sensibles à la prédation. Une population stable de taupes est constituée à parts égales de jeunes immatures, d'individus matures d'un an, et d'individus de deux ans et plus. La longévité de l'animal est limitée à cinq ans au maximum, à cause de l'usure de sa denture par la terre. Ses activités de fouissement en font une espèce ingénieur qui modifie fortement son environnement en aérant le sol et en remontant à la surface les éléments profonds. Par ses taupinières et ses galeries, elle facilite la vie de nombreuses plantes et favorise le développement de nombreux animaux comme des papillons de jour, d'autres micromammifères et des batraciens, mais également de quelques champignons.

Présente dans les climats tempérés d'Europe, jusqu'en Sibérie occidentale, la Taupe d'Europe fréquente des habitats variés. Elle se plaît notamment dans les prairies et les forêts de feuillus à sol meuble et peu acide, et dans une moindre mesure dans les forêts de conifères et les terrains acides ou fortement sablonneux et marécageux. Adaptée à la vie en milieu extrême, elle évolue dans un réseau de galeries souterraines sombre et pauvre en oxygène, d'une longueur de 100 à 200 m, généralement situé à moins de 15 cm de profondeur, mais pouvant s'enfoncer jusqu'à 150 cm. Une partie de ce réseau est quasi permanente et empruntée par des générations successives de taupes. Lorsqu'elle creuse ses galeries de chasse, la taupe évacue les déblais sous forme de taupinières par une cheminée verticale. Ce réseau comprend un gîte garni de feuilles sèches, situé au carrefour de plusieurs galeries, ainsi que des chambres secondaires, garnies de réserves alimentaires en prévision des mois de disette des étés secs ou des hivers froids.

Du point de vue agricole, elle diminue la quantité et la qualité du foin et de l'ensilage. La taupe provoque des dégâts aux cultures et au matériel, de même qu'elle détériore l'esthétique des gazons. C'est pourquoi elle est parfois considérée comme un animal nuisible. De nombreuses méthodes mécaniques et chimiques existent pour limiter son impact ; certaines étant aujourd'hui interdites, beaucoup restant inefficaces. L'effarouchement ou le piégeage mécanique avec les taupières sont considérés comme préférables. Par le passé, elle était chassée pour sa fourrure qui faisait l'objet d'un commerce florissant, principalement au début du XXe siècle. Le contact avec l'animal devrait se faire avec précaution car il est le réservoir d'un hantavirus spécifique dont la pathogénicité chez l'humain est inconnue, mais dont certains proches parents sont responsables de graves maladies. Ses populations sont stables et ne sont pas en danger, bien que la concentration d'individus diminue fortement dans les zones de cultures où l'usage des insecticides est en vigueur, ainsi qu'à proximité des zones industrielles et citadines où la pollution aux métaux lourds lui est défavorable. L'utilisation de la taupe dans les pratiques rituelles païennes, comme remède populaire, date au moins de l'Antiquité et a traversé les millénaires, malgré les condamnations du clergé. La taupe est alors considérée comme un être des forces du mal, symbolisant la mort ; plus son agonie et sa souffrance duraient, plus la puissance du remède était forte et la délivrance du malade proche.


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