Holodomor

Holodomor
Logo noir et blanc figurant une silhouette d'adulte mince aux bras écartés et un enfant
Symbole de commémoration du Holodomor apparaissant sur un timbre ukrainien de 1993.

Pays Drapeau de l'URSS Union soviétique
Lieu RSS d'Ukraine, Kouban (Russie)
Coordonnées 49° 00′ 00″ nord, 32° 00′ 00″ est
Période 1932-1933
Victimes entre 2,6 et 5 millions de morts

Le terme Holodomor (ukrainien : Голодомо́р, littéralement « famine », de la racine го́лод, « faim », et мор, « fléau », formé comme calque du tchèque hladomor, « famine », en 1933, mais qu'on peut traduire par « extermination par la faim ») désigne la grande famine qui eut lieu en république socialiste soviétique d'Ukraine et dans le Kouban (république socialiste fédérative soviétique de Russie), en URSS, en 1932 et 1933, et qui fit, selon les estimations des historiens, entre 2,6[1] et 5 millions de morts[2]. Sans précédent dans l'histoire de l'Ukraine, l'événement se produisit dans le contexte plus général des famines soviétiques de 1931-1933 et fit un nombre particulièrement élevé de victimes[a].

Depuis l'ouverture des archives soviétiques après la dislocation de l'URSS en 1991, la négation de la famine a cessé, mais son ampleur et le caractère intentionnel de cette famine sont contestés. Bien avant que le nom de « Holodomor » ne soit forgé, la famine avait été décrite, dès 1935, par Boris Souvarine[4], et faisait partie de la mémoire collective mais clandestine des populations concernées : seules les publications dissidentes, les samizdats, l'évoquaient par écrit. Quarante ans plus tard, elle est à nouveau révélée par la publication de L'Archipel du Goulag d'Alexandre Soljenitsyne.

Au début du XXIe siècle, la responsabilité des autorités soviétiques dans la genèse et l'ampleur de la famine (à travers la collectivisation, les campagnes de « dékoulakisation », les réquisitions excessives de denrées alimentaires auprès des paysans et les limitations aux déplacements imposées en pleine famine) est généralement reconnue.

Fin 2006, l'Ukraine indépendante qualifie officiellement le Holodomor de génocide, qualification reconnue par un certain nombre de pays dont les États-Unis. Mais le caractère génocidaire de cette famine est contesté, notamment par le Kazakhstan et la Russie qui ont également beaucoup souffert de cette famine[5]. La négation du Holodomor comme génocide concerne l'importance relative des différents facteurs ayant engendré la famine, ainsi que les intentions de Joseph Staline, dirigeant absolu de l'Union soviétique à l'époque[6]. L'aspect intentionnel de la famine est discuté par certains historiens[7],[8],[9]. Le jour commémoratif du Holodomor est fixé au quatrième dimanche de novembre.

Le Parlement européen reconnaît en 2008 le Holodomor comme un crime contre l'humanité, jugeant qu'il s'agissait d'une famine provoquée et d'un « crime contre le peuple ukrainien et contre l'humanité[10] », et le qualifie de génocide en 2022[11]. En avril 2023, l'Assemblée nationale française qualifie également cette famine de génocide[12],[13].

L'Holodomor est reconnu par 33 pays comme un acte génocidaire ou d'extermination, mais l'ONU ne le classe pas au nombre des génocides reconnus par interprétation de sa définition de référence[14].

Le film L'Ombre de Staline d'Agnieszka Holland, sorti en 2019, ainsi que l'ouvrage collectif Le Livre noir du communisme, rappellent comment le pouvoir soviétique a caché et nié la famine[15],[16]. Nicolas Werth dans un CD paru au CNRS a qualifié cette famine comme le « plus grand crime de masse du stalinisme »[17].

  1. (en) Jacques Vallin, France Mesle, Serguei Adamets et Serhii Pyrozhkov, « A New Estimate of Ukrainian Population Losses During the Crises of the 1930s and 1940s », Population Studies, vol. 56, no 3,‎ , p. 249-264.
  2. Conquest 1995, p. 331.
  3. Graziosi 2005, p. à préciser.
  4. Boris Souvarine, Staline, Paris, Plon, .
  5. « L'Holodomor de 1932-1933, une tragédie partagée », RIA Novosti 25 novembre 2008.
  6. Selon Stephen Wheatcroft, « The disagreements concerning the causation of the famine is not so much concerned with the individual factors that caused the famine, but with their relative importance and how they influenced the concrete situation in certain locations at certain times. Most analyses fail to appreciate the complex buildup of the crisis into the famine and the separate factors that affected the separate stages », « Toward explaining Soviet Famine of 1931-3: political and natural factors in perspective », Food and Foodways, 2004, p. 126.
  7. A. Guillemoles, « Bataille pour la reconnaissance d'un génocide », in Le Courrier des pays de l'Est, n° 1067 (3), 2008, pp. 67-70.
  8. Stephen Wheatcroft, article « Toward explaining Soviet Famine of 1931-3: political and natural factors in perspective », in Food and Foodways, 2004, p. 126.
  9. Encore en 2008, les critiques de Soljenitsyne qualifiaient de « fable insensée » l’idée que le Holodomor ait pu être un génocide : A. Guillemoles, « Bataille pour la reconnaissance d'un génocide », in Le Courrier des pays de l'Est, n° 1067 (3), 2008, pp. 67-70.
  10. Commémoration du Holodomor, la famine artificiellement provoquée en Ukraine (1932-1933), texte adopté le jeudi 23 octobre 2008 par le Parlement européen.
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  12. « L'Holodomor qualifié de génocide par l'Assemblée nationale : Moscou condamne un « zèle anti-russe répugnant » », sur LEFIGARO, (consulté le ).
  13. Anna C. Zielinska, « La notion de génocide : entre l’histoire, le droit et la politique », sur theconversation.com, (consulté le ).
  14. « Massacre de Srebrenica : quels sont les génocides reconnus par l’ONU ? », La Croix,‎ (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le )
  15. François Lévesque, « “Mr Jones” : Agnieszka Holland, la traversée de l’Holodomor », Le Devoir,‎ (lire en ligne).
  16. Nicolas Werth, Le Livre noir du communisme : crimes, terreur, répression, Paris, Robert Laffont, , 923 p. (ISBN 2221088611), p. 187
  17. La grande famine en Ukraine 1932-33 [Enregistrement sonore : le plus grand crime de masse du socialisme / Nicolas Werth, aut., participant ; documents et témoignages lus par Catherine Jarrett]


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